Entretien avec Cazalis de Fondouce

  • Pouvez-vous vous présenter succinctement ?

En préambule, je suis vraiment un profane dans le domaine sylvicole. Quand on avance dans une spécialité, dans un domaine professionnel ou dans un métier, c’est un peu comme lorsque l’on nage vers la mer et que l’on s’éloigne de la côte. Au début on voit le fond et on se dit qu’on sait, mais on se rend vite compte que plus on s’éloigne plus on réalise qu’on ne sait rien. Et lorsque l’on se rend compte que l’on ne sait pas, c’est là qu’on peut vraiment apprendre.

J’ai fait l’essentiel de ma carrière dans l’industrie, j’ai fait polytechnique de Zurich (même école que Ernst Zurcher qui est intervenu lors de l’AG, ainsi que Brice de Turckheim), mais personnellement j’ai fait la section Biologie et agronomie alors qu’eux étaient dans la section forestière. Je suis rentrée dans l’industrie (Chimie et Pharmacie), mais dans le secteur Busness et management et principalement en dehors de nos frontières (entre la Belgique, Angleterre, USA, et une 20aine d’année en Asie). La dimension essentielle c’était le croisement entre l’Asie et le management d’équipe local.

  • Quel fut votre parcours jusqu'aux forêts ? 

Je suis venu à la forêt par amour et par mariage, au départ je n’avais aucun contact avec la forêt, je suis originaire du Midi de la France (ou j’avais des micros massifs de Pins d’Alep qui avaient une importance visuelle très importante, mais peu d’un point de vue sylvicole), et c’est mon épouse Ghislaine d’Orglandes (fille de Hugues d’Orglandes) qui m’a initié et montré la beauté de la forêt.

Hugues était vraiment un très grand amoureux, quelqu’un qui était arrivé par la forêt pas par formation, mais en reprenant le Domaine de Lonné. Hugues avait été un initiateur de cette aventure intellectuelle, biologique, pratique et forestier de la culture jardinatoire et de la sylviculture Prosilva. C’est après son décès que j’ai réalisé que mon beau père avait joué un rôle très important sur le développement de la sylviculture irrégulière, c’était vraiment un homme très humble pour qui j’ai toujours une grande admiration.

Hugues m’a fait aimer la forêt et Michel m’a initié à la forêt. Michel de Vasselot a passé des heures à nous former et nous partager sa passion pour cette forêt qu’est Lonné. Brice et Michel ont théorisé la coupe jardinatoire en utilisant l’approche empirique.

  • Combien d’ha gérez-vous et où se situent vos forêts ? 

Les forêts de Chêne, dont celle de Lonné, dans laquelle nous aimons nous promener. « Rentrer dans une forêt c’est comme de rentrer dans une cathédrale » cette phrase de Philippe de Saizieu m’a toujours beaucoup parlé, car c’est toujours une grande émotion liée à de l’humilité qui m’imprègne lorsque je rentre dans une forêt. Il y a une certaine ambiance qui vous rapproche du sacré, et en tant que profane, ce qui m’a le plus impressionné c’est le côté sacré. On ne le voit pas dans toutes les forêts évidemment ni comme on ne le voit pas dans tous les bâtiments, mais cela s’accompagne avec l’émotion. Et le sacré parle directement à l’âme. Je ne parlerai pas technique, car je n’y connais rien, mais j’ai nagé dans la mer suffisamment loin pour savoir que je n’y connais rien, mais Michel vient toujours nous repêcher pour nous montrer comment cela fonctionne.

Les plus belles entreprises sont celles où le plaisir intellectuel, l’émotion se joint avec le côté pratique et donc à l’économie. Quand vous avez cet équilibre esthétique, émotionnel, et économique, vous avez un accord parfait, une vraie symphonie. J’aimerais qu’on aborde la question économique de la forêt, c’est ma formation professionnelle, et mon expérience. En sylviculture jardinée, les résultats sont très bons ! Je parlais d’un équilibre symphonique tout à l’heure et la partie économique est fondamentale. La dimension économique dans toute aventure est essentielle, il faut qu’il y ait une réussite ou un équilibre financier dans lequel on satisfait les 3 dimensions (sentimental, esthétique et économie). L’économie joue son rôle, et c’est grâce à elle que la pérennité des entreprises est assurée.  Sans économie on ne peut pas assurer le bon déroulement de l’aventure. En forêt c’est absolument essentiel.

Le groupe familial auquel j’appartiens en tant que pièce rapportée a une chance incroyable d’avoir une forêt d’une très grande qualité. C’est quelque chose que j’ignorai au départ (car nous ne rentrions que peu en France et nous voyions cette forêt que lors des vacances estivales.

Je n’ai rencontré Brice de Turckheim qu’une seule fois lors d’un déjeuner familial après un martelage, et je me souviens du personnage, et j’avais été frappé par son côté alsacien (sérieux et professionnel, mais les échanges qu’il avait à table avec mon beau père montrait une immense complicité). Hugues a tout appris grâce aux différentes sorties terrain qu’il a réalisées avec Brice et Michel de Vasselot.

  • Souhaiteriez-vous aborder un sujet en particulier ?

J’ai eu une discussion il y a quelques mois avec Michel et Benoit j’en avais retenu plusieurs choses :

  • Trouver dans la forêt une dimension économique additionnelle, vient conforter le revenu de l’exploitation, et c’est une formidable idée,
  • J’ai connu dans mon expérience professionnelle, l’expérience carbone. L’entreprise pour lequel je travaillais, faisait la création et la vente de crédit Carbone, donc j’y suis assez sensibilisé,
  • S’il y avait un dictionnaire amoureux de la forêt à écrire, il aurait fallu demander à Brice et Hugues, car ce serait une aventure à réaliser. Il y aurait une dimension intellectuelle, pédagogique, pour le grand public ce serait extraordinaire.